D’un côté la lumière rouge semble être à l’origine de nombreux méfaits sur la faune et la flore aquatiques, de l’autre elle permettrait une amélioration de la qualité de vie en zone urbaine. Mais alors pourquoi de telles différences ?
La pêche à la led rouge
En mai 2022, dans les journaux ou à travers les réseaux sociaux, nous avons tous découvert les images du ciel chinois rougi par les panneaux leds des navires de pêche. L’intensité lumineuse et la longueur d’ondes de la lumière rouge étaient telles qu’à plusieurs centaines de kilomètres dans les terres, un halo rouge était perceptible. Les habitants de la ville côtière de Zhoushan ont cru à l’arrivée de violents incendies voire à celle des extraterrestres
Ces techniques de pêche très controversées voire interdites dans certaines eaux représentent un véritable danger pour les écosystèmes marins. Ce danger provient de la sensibilité de l’écosystème marin et d’une perception lumineuse plus complexe et sensible. De nombreuses espèces ne perçoivent en effet que certains spectres de la lumière et sont donc irrémédiablement attirées par cette lumière rouge. Ce signal lumineux perturbe leur cycle circadien mais détourne également les poissons et mammifères marins migrateurs de leur route habituelles. Plus encore, la lumière rouge dans la mer peut également engendrer des dysfonctionnements en matière de reproduction animale.
En agglomération, à l’inverse, la lumière rouge présente des bénéfices pour la faune, la flore et tous les écosystèmes. Contrairement aux lumières blanche ou bleue, le spectre rouge de la lumière nuit nettement moins au rythme naturel des espèces animales et végétales, selon leur stade de développement ou de floraison. Les chauves-souris, les oiseaux et les insectes, sont donc moins perturbés par ces sources de lumière. L’utilisation de cette couleur contribue donc au maintien de l’équilibre écologique des zones urbaines.
Au-delà de la faune et de la flore, l’utilisation de la lumière rouge présente également des avantages pour l’espèce humaine. A la tombée de la nuit, les passants s’aventurant sous la lumière rouge ne voient pas leur production de mélatonine perturbée. Ils bénéficient donc d’une bonne visibilité nocturne sans nuire à leurs cycles de sommeil.
L’aspect rue ensanglantée, conféré par la lumière rouge des lampadaires, peut en faire frissonner plus d’un. Cette lumière offre pourtant une luminosité suffisante pour la sécurité des usagers tout en garantissant une bonne perception des mouvements dans l'espace urbains.
L’éclairage urbain rouge est-ce une solution durable ?
La lumière rouge garantit la préservation des cycles circadiens humains mais également une plus faible consommation énergétique. Par ailleurs, cela fait longtemps qu'elle est utilisé pour les phares et les lampes d'appoint comme les frontales pour les campeurs. Le fait qu'elle n'attire pas les insectes est donc déjà connu du grand public. Cela offre aussi la possibilité d’utiliser les technologies Led basse consommation qui induirait la réduction des coûts d’éclairage municipal.
Le quartier Saint-Christol de Pézenas, aux abords de Béziers, devrait utiliser le «Far Red » à sa sortie de terre. De l’autre côté de la France, à Lyon, c’est le quai Jean-Jacques Rousseau dans le quartier de la Mulatière qui s’est paré de « leds spéciales biodiversité » selon l’entreprise Serpollet chargée des travaux. Dans ces deux quartiers, les municipalités ont opté pour la lumière rouge afin de préserver la faune et la flore.
Cet éclairage dispose néanmoins de quelques limites et contraintes notamment au niveau de la perception visuelle. Le rouge peut réduire la perception des autres couleurs, diminuer la netteté visuelle et augmenter le sentiment d’insécurité. Ce dernier point est plus de l’ordre du ressenti : il confère une perception moins accueillante de l’espace public et peut même induire un effet anxiogène chez certains usagers. Par ailleurs, comme le souligne Hervé Audibert, concepteur lumière à la tête de notre atelier, l'utilisation de la lumière rouge risque d'aplanir les reliefs ce qui pourrait entrainer plus de chute ou d'accidents.
Certaines solutions alternatives et hybrides peuvent donc être envisagées. Il est notamment possible d’installer des variateurs d’intensité et du spectre lumineux, voire des lampes à détection de présence ou de mouvements en fonction de l’heure. Il est également possible d’utiliser des technologies intelligentes de gradation, du Dali, du DMX ou une combinaison de différentes sources lumineuses.
Conclusion
La lumière rouge et son utilisation en fonction des milieux montrent que l’éclairage doit avoir une approche prenant en compte le contexte et l’aspect écologique. En effet, ce qui peut être nocif dans un environnement peut être totalement bénéfique dans un autre. La lumière rouge n’est donc pas une solution universelle mais offre une piste de réflexion majeure dans la mise en lumière urbaine.
Pour trouver la meilleure des solutions en matière de mise en lumière urbaines, il est donc nécessaire de continuer à faire des expérimentations et des études approfondies notamment en consultant les habitants des zones urbaines concernées
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